vendredi 12 mars 2010

15) Carnet de voyage.Une journée bien remplie

“Toc,toc, toc toc ! Toc,toc, toc toc !” J'entendis dans mon rêve, le bruit d’un brigadier de théâtre que l’on frappait sans interruption sur le sol. Je ne rêvais plus, le son se rapprocha de la porte de la chambre, stagna puis s'en alla plus loin. Le bâton jouait plus agréablement qu'un réveil mécanique mais nous avions du mal à émerger, il n'était que trois heures trente. Puis la mesure du bâton, s'amplifia de nouveau :“Toc,toc, toc toc ! Toc,toc, toc toc !” Enfin, il s'éloigna vers d'autres chambres et se tut.
Pour nous trois, il était évident que nous allions à la cérémonie et nous avions pris l'annonce de la nonne pour une invitation. Une cigarette, un peu de thé dans de l'eau chaude et une douche tiède nous remirent en forme, ou presque. Nous entrâmes dans le monastère, vers quatre heure, il faisait encore chaud, la salle brillait de mille fruits dont les plus impressionnants étaient des durians de plus de dix livres ; des cacahuètes, (qui en Chine valent peanuts), des friandises et des pièces de monnaie complétaient les offrandes au Bouddha. Les bonzesses semblèrent ravies de nous voir et nous installèrent des coussins sur le sol ; aussi, sept bonzes, vêtus de toges oranges, orchestraient la cérémonie ; enfin trois profanes se tenaient face à l'autel dans le but d'être initiés. La célébration commença par d'harmonieux tintements de clochettes, d'impressionnants mantras chantés par les moines suivirent bientôt. Nous étions placés derrières les nonnes et les imitions dès qu'elle se prosternaient, nous n'étions pas plus ridicules que les autres profanes car nous avions un peu d'entrainement. Tous les pratiquants étaient tournés vers la porte restée grande ouverte et c'est nous, au fond de la salle, qui avions la meilleure vue d'ensemble. À un moment nous suivîmes les nonnes qui s'avançaient vers l'hôtel ; l'un des bonzes, la réincarnation de Yul Brunner, un moine d'une beauté cinématographique, nous remit un bâton d'encens qu'il fallait allumer, lever au dessus de la tête et placer sur le reposoir. Lorsque Yul me tendit le carré d'encens, il me sourit, à la fois surpris et heureux, j'entendis mentalement : « Tiens, te voilà toi ? » et je lui répondis, non-moins souriant, de la même manière : « Dame vère, me v'là ! » C'était le premier Chinois qui comprenait le gallo, car il sourit davantage. Pendant ce temps les sonnailles sonnaient et les mantras résonnaient. Le jour se leva avant que la cérémonie ne s'achevât, celle-ci avait durer deux heures trente. C'était un peu long, nous avions peiné la dernière demi-heure, sans doute à cause de notre réveil matinal et du manque de glycémie. J'avais oublié l'Europe, j'étais vraiment dans un autre Monde. Les participants se partagèrent les générosités et nous reçûmes cacahuètes, fruits, gâteaux secs et même quelques yuans. (c'était la première fois qu'on me faisait l'aumône.) L'argent nous brûla les doigts et nous le refilâmes discrètement à une nonnette tout près de nous qui se montra contente. J'aidai une jeune bonzesse qui avait hérité d'un durian, et qui n'avait pas assez de bras, à le transporter jusqu'à son logement. Je pus apercevoir, par la même occasion, que les nonnes avaient de petites chambres, sobres mais agréables... et zen. Les bonzes s'étaient éclipsés, c'était le jour puisque la plus longue éclipse du siècle était en train de se produire et l'ombre de la lune allait assombrir la terre deux heures plus tard à Jiuhashan. Nous nous rendîmes au réfectoire pour le petit-déjeuner.
À bientôt.

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